Dimanche, à Rodilhan, s’est tenue à nouveau une corrida, ce cérémonial sanglant illégal quasiment partout dans le monde sauf dans huit pays dont le nôtre – et encore, seulement dans les onze départements du sud où les spectacles de torture de bovins sont exemptés de poursuites en correctionnelle. Car dans les 90% restants de notre territoire, ces sévices graves sur animaux sont fort heureusement punis de prison et d’amendes.

Et, à nouveau, le maire Reder a fait transformer sa commune en prison de haute sécurité, encerclant tout le centre-ville de barrières de deux mètres de haut, mobilisant 250 gendarmes pour empêcher toute intrusion.

Oui, je dis bien toute intrusion de personnes libres et non toute évasion des conscrits écroués, car lorsque les aficionados se retrouvent à Rodilhan, ce sont eux qui sont enfermés après avoir été fouillés et conduits jusqu’à l’arène par des goulets hautement sécurisés, ce sont eux les prisonniers honteux, les détraqués avides de sang innocent, les barbares que le reste du monde, sidéré, montre du doigt avec dégoût en découvrant leur survivance comme dans un mauvais film de zombies.

Et ils appellent ça une fête ?

Et ce sont nous qui restons à l’extérieur dans le monde libre, nous les citoyens normaux qui osons demander un débat démocratique sur l’anomalie juridique qui protège une pratique abjecte, nous qui sommes tenus à distance par d’abondants jets de lacrymogènes à l’extérieur du bagne provisoire où ces dépravés vont se cacher pour assouvir leurs pulsions perverses et sadiques. Nous qui nous mettons en danger physique permanent sans jamais répliquer. Nous qui osons seulement demander que tous les Français soient égaux devant la Loi.

Et on nous appelle des terroristes ?

Déjà trois ans que le lynchage de 70 manifestants anti-corrida pacifiques a été commis dans ces lieux ignobles en octobre 2011. Déjà un an et demi que, l’un après l’autre, trente agresseurs ont été dûment identifiés et entendus par l’adjudant-chef Joss, qui a ensuite remis le dossier complet à Mme Beccuau, la procureure de Nîmes. Déjà un an que cette dernière a déclaré à la presse que le dossier était bouclé et que le procès aurait lieu début 2014. Avant de se raviser il y a quelques semaines pour dire qu’il fallait encore procéder à “quelques vérifications ponctuelles” et que l’audience se tiendrait finalement “courant 2015”.

Et le pouvoir s’étonne que nous revenions encore et toujours manifester à Rodilhan ?

Quand seront donc enfin traînés en justice les aficionados haineux dont les violences ont été filmées et diffusées publiquement ? Quand sera t-il enfin possible de les juger et de les condamner ? Quand verra t-on dans notre pays une justice aussi prompte à réagir lorsqu’il s’agit de poursuivre des brutes déchaînées qui frappent des humains à terre avec sauvagerie que lorsque des citoyens indignés par leur ignominie les traitent de sadiques et de pervers, ce qui est pourtant la définition du dictionnaire ?

Nous demandons justice. Est-ce quelque chose d’audible dans notre pays ?

Roger Lahana
Vice-président du CRAC Europe

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