En septembre 2011, le CRAC Europe et Droits des Animaux ont saisi le tribunal administratif de Paris d’un recours en annulation contre la décision d’inscription de la corrida au patrimoine immatériel de la France.

Dans le cadre de cette procédure, une QPC, question prioritaire de constitutionnalité, a été soulevée, visant à contester la constitutionnalité de l’article 521.1 du Code pénal, selon lequel les peines relatives à la cruauté contre les animaux domestiques ne s’appliquent pas aux corridas « lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ».

Lors de l’audience publique du Conseil d’État du mercredi 6 juin 2012, le rapporteur public a conclu au renvoi de notre QPC devant le Conseil constitutionnel, conformément à notre demande.

Dans ses conclusions orales très argumentées, le rapporteur public a souligné le caractère « sérieux » de la QPC, « la difficulté réelle » qu’elle pose et le « contrôle de proportionnalité » à ses yeux « indispensable » que devrait exercer le Conseil constitutionnel sur les effets juridiques, fussent-ils « ténus », du classement décidé par le ministre au regard des dispositions pénales.

Par décision du 20 juin 2012, le Conseil d’État a suivi les conclusions du rapporteur, bien que le garde des Sceaux (Michel Mercier, du gouvernement Fillon) ait demandé le rejet de la QPC. La question de la conformité à la Constitution de l’article 521.1 du Code pénal est donc renvoyée au Conseil constitutionnel. La porte est donc ouverte pour une remise en cause de l’alinéa 7 de l’article L 521.1, et donc de l’existence même de la corrida en France !

Le classement de la corrida au patrimoine culturel immatériel français en janvier 2011 pose en effet une double question. Comment peut-on classer au patrimoine national un acte réprimé par deux ans de prison et 30 000 euros d’amende sur 90 % du territoire ? Et, au-delà de ce classement si controversé, comment des « sévices graves et des actes de cruauté » (article 521.1 du Code pénal) peuvent-ils bénéficier d’une exception sous couvert de « tradition locale » (alinéa 7 de ce même article) ? La République n’est donc plus « une et indivisible » depuis avril 1951 (loi Ramarony-Sourbet). C’est tout le sens de cette QPC présentée et argumentée par notre avocat, maître Éric Verrièle, du barreau de Paris.

Jean-Pierre Garrigues
Vice-président du CRAC Europe

David Chauvet
Président de DDA