Journée parrainée par les commissions estonienne, flamande, française et marocaine pour l’Unesco. Y sera débattue entre autres cette question cruciale : Quels sont les critères de définition d’un PCI ? Ce 3 juin, une dizaine de militants du CRAC Europe, dont Sabine Landais, déléguée pour les Yvelines, et du groupe « Plus un citoyen dans la lutte » se sont invités à cette conférence et ont pris place dans la salle.
Une fois tous les participants en place, et alors que le président allait inviter sur scène les principaux protagonistes, Jules et Muriel ont pris la parole, pendant que sept militants montaient sur scène pour déployer trois banderoles : « Non à la honte française », « Non à la corrida au patrimoine culturel de la France » et « La torture n’est pas notre culture ».

Voici les textes, rédigés par Jean-Luc Bernard, dans leur intégralité.

Premier texte (Jules)

Bonjour, messieurs dames, bien sûr, cette petite intrusion peut vous étonner, elle n’était pas annoncée sur le programme et pourtant elle n’est pas hors sujet. Nous sommes ici au nom de la très grande majorité du peuple français à qui l’on a annoncé en catimini en 2011 que les spectacles de torture, les corridas, étaient désormais inscrits à leur patrimoine culturel immatériel. Après toute une série de réactions d’indignation et de colère, des actions ont été menées auprès du ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, qui nous a finalement déclaré qu’il n’était personnellement pas favorable à la corrida et n’avait pas maîtrisé le sujet, ni « vu le coup venir »… Nous ne sommes pas ici pour contester les chants basques ou la tarte Tatin, mais bien le maintien des dernières perversions et barbarie de notre humanité. Nous sommes ici pour témoigner encore une fois de notre rejet de cette ignominie civilisationnelle, et pour dire que jamais le peuple français n’acceptera d’être perçu, chez lui comme dans le monde entier, comme un tortionnaire, un pervers, un sadique « culturel ». Et enfin, nous profitons de cette tribune improvisée pour interpeller, en tant que citoyens, le nouveau ministre de la Culture ou ses représentants dans la salle.

Deuxième texte (Muriel)

Madame la Ministre, nous vous demandons expressément, au nom du peuple français, de bien vouloir retirer cet outrage à notre culture et civilisation qu’est l’inscription de la corrida à notre patrimoine culturel immatériel. Nous vous demandons, si toutefois vous cautionnez les erreurs de votre prédécesseur (ce que nous n’osons croire, compte tenu de votre engagement personnel contre la corrida), nous vous demandons de faire toute la lumière, toute la transparence sur ce qui a conduit à cette ignoble et contestable inscription. Et nous vous posons la question, Madame la Ministre : pourquoi, à cette heure, le décret ministériel qui a entériné l’inscription de la corrida lors du précédent mandat n’est-il toujours pas paru officiellement ? Y a-t-il observation de quelque vice de procédure que l’on voudrait nous cacher ? Ou cherche-t-on à retarder, voire bloquer les procédures de recours engagées, notamment par les associations de protection animale ?

Troisième texte (Jules)

Aux experts de l’Unesco ici présents, nous posons en préambule les questions suivantes :

  • 1. Comment une « notion » comme la corrida, qui véhicule de la souffrance, de la cruauté, de la barbarie, une notion qui apparaît comme une honte civilisationnelle, une notion contestée désormais sous tous les angles, y compris par sa propre minorité de spectateurs, qui se fait de moins en moins présente dans les arènes, comment cette notion peut-elle et doit-elle encore apparaître comme une « culture » ?
  • 2. Une « notion » qui s’inscrit dans un patrimoine culturel immatériel ne doit-elle pas, si ce n’est faire l’adhésion de tous, au moins ne pas provoquer de dissensions fortes, voire de troubles à l’ordre public ? Quels sont les recours lorsque cela se présente ?
  • 3. Quels sont les critères d’inscription d’une « notion » à l’Unesco et, plus concrètement, est-ce que les spectacles de torture, les « corridas » ainsi que les pseudo-traditions qui subsistent et véhiculent du cruel, de la souffrance, font couler le sang, est-ce que les derniers relents de la barbarie humaine peuvent un jour voir leur nom apparaître sur un piédestal dans le patrimoine de l’humanité ?

Conclusion du président de séance :
« Vous apportez la preuve que le patrimoine culturel immatériel est présent en France et qu’il provoque et suscite des débats qui sont toujours sains et extrêmement importants. Les questions que vous posez seront certainement, aujourd’hui ou en d’autres occasions, débattues, car vous posez des questions de fond. »

Pendant la lecture de ces textes, les organisateurs et participants du forum ont été attentifs et réceptifs. Des caméras officielles filmaient, mais nous ne savons pas à qui sera diffusé le film et si des coupures seront faites.
La ministre Filippetti n’était pas là.
De nombreux participants internationaux ont pris des photos et filmé.
À la fin des discours, des spectateurs ont applaudi, et des Mexicains ont pris contact avec Jules en expliquant mener le même combat.

Vidéo de l’action

Compte-rendu par Sabine Landais
déléguée CRAC Europe 78