La présélection

Les éleveurs recherchent les « sujets chez qui le goût du combat est le plus développé » disent-ils. Toreros et éleveurs se fixent sur un faisceau d’indices qui constituent « l’apparence globale du taureau ». Les parents du futur « combattant » doivent être sélectionnés, puis il faut « conserver et développer chez le produit » :

  • Sa « bravoure », qualité qui pousse le taureau à charger la tête en bas. Cette caractéristique est importante car si l’animal chargeait avec la tête haute, voire à mi-hauteur, il rendrait la tâche du torero plus difficile.
  • Sa construction physique, qui est primordiale pour que le taureau ait plus de facilité à mettre la tête en bas. Il doit posséder :
    – Un garrot plus bas que l’arrière train.
    – Un long cou : plus il est court, moins il lui permet de suivre, tout près du sol, le leurre que lui propose le torero.

Le recours à des croisements entre parents rapprochés, permet de conserver la qualité voulue, au risque, avec la consanguinité qui en découle, de tomber dans des « problèmes de faiblesse ». Par sélection génétique, les éleveurs, arrivent à produire des taureaux moins dangereux qui chargent les tissus rouges et non les hommes.

« Il suffit d’interposer un objet entre le taureau et sa proie pour que celui-ci délaisse la proie pour l’objet et le suive ». Ce sont eux qui le disent !

La préparation au combat

Avant le combat, le taureau est parfois préparé. Diverses parties du corps de l’animal peuvent être affaiblies. Il arrive fréquemment que ses cornes soient sciées de quelques centimètres, ce qui est aussi douloureux que de tailler des dents à vif pour un être humain et qui, de plus, fait perdre au taureau ses repères spatiaux (voir plus bas). D’autres pratiques tout aussi scandaleuses et souvent frauduleuses peuvent exister dans le but d’affaiblir l’animal avant son entrée dans l’arène.

L’usage en dose massive de sédatifs ou d’anti-inflammatoires (dans le but de faire mieux résister le taureau à la douleur qu’il va devoir subir) a également été dénoncée par des vétérinaires d’arènes, sans qu’il soit possible de savoir à quelle fréquence ces tricheries sont utilisées.

Maintenant… le « spectacle » peut enfin commencer.

Le transport

Les taureaux sont ensuite transportés vers les villes taurines. C’est une épreuve douloureuse. Arrachés à leur milieu naturel, ces animaux sont enfermés dans des caissons de contention en bois mesurant moins de 2 m2. Les trajets depuis le Sud de l’Espagne peuvent durer plusieurs jours et les bêtes n’ont aucune possibilité de bouger. Il arrive même qu’on leur fasse passer le trajet sur un plan incliné. Au-delà de la fatigue qui en résulte, elles ne reçoivent ni eau, ni nourriture.

Les transports ayant essentiellement lieu en saison estivale, certains animaux entassés perdent jusqu’à 30 kg dans les camions surchauffés. En 2001, plusieurs taureaux déshydratés ont été retrouvés sans vie dans ces camions de la mort. Certains seront retrouvés morts asphyxiés.

Arrivés aux arènes, les taureaux seront ensuite sortis à coup de jet d’eau, de bâton, d’injures, comme ils ont été embarqués, avec la même délicatesse.

Et le calvaire ne fait que commencer…

L’Afeitado

Photo Jérôme Lescure
Photo Jérôme Lescure

Il s’agit d’une pratique consistant à scier à vif plusieurs centimètres au bout de chaque corne, l’opération étant ensuite camouflée avec de la résine et du vernis pour que les cornes aient l’air intactes. Cette mutilation répond à un triple but :

– infliger une souffrance additionnelle au taureau (les cornes sont innervées et la douleur est comparable à celle d’une dent humaine qui subirait la même chose), ce qui va bien entendu augmenter sa détresse juste avant de devoir faire face au choc de se retrouver dans une arène close dont il ne peut s’échapper,

– désorienter le taureau, qui a une image mentale précise de la longueur de ses cornes avant mutilation et qui donc va manquer de toucher ses tortionnaires quand il tente de les encorner,

– réduire le risque pour le torero d’être blessé ; le taureau ayant très mal aux cornes, il va hésiter à s’en servir pour repousser ses agresseurs.

Cette déloyauté a donc pour but de désarmer l’animal. En effet, il ne dispose généralement pas d’un délai suffisant pour prendre connaissance de la nouvelle longueur de ses cornes et ainsi adapter son coup de tête.

Après la scie et le marteau, les cornes sont reconstituées plus courtes avec de la résine synthétique, elle seront râpées, poncées, pour être ensuite vernies. Il n’est pas rare de voir des cornes trafiquées éclater lorsque le taureau heurte les balustrades.

« A deux mètres du taureau, ses cornes conservent tout leur aigu. Vues de très prés, comme seul le torero les voit, leurs extrémités présentent un aspect légèrement arrondi. Cette pratique a des effets psychosomatiques sur le mental des toreros qui en sont friands ». Ils réclament généralement tous l’afeitado.

C’est dans une bulle papale que l’on trouve l’origine de l’afeitado. L’église interdisait la corrida sous prétexte qu’un noble chrétien ne pouvait accepter de risquer gratuitement sa vie ailleurs qu’en combattant l’Infidèle. Sous la pression des souverains espagnols et portugais, Grégoire XIII, transigea et autorisa les corridas à la condition que tout danger mortel en soit exclu, c’est à dire en coupant les cornes ! De nos jours, l’Eglise n’a plus rien à voir à l’affaire. Pourtant l’afeitado persiste.

Si l’afeitado est « encore plus répandu qu’on veut bien le dire », il est beaucoup moins flagrant que ce l’on prétend. Tout à fait invisible à l’œil nu et indécelable de façon infaillible à l’analyse, cette mutilation « a cours même dans les plus grandes arènes espagnoles ».

« Enveloppé dans un immense suaire d’hypocrisie, le règlement de l’affaire est régulièrement renvoyé aux calendes grecques dès que la question est abordée dans les instances de régulation du spectacle taurin, qu’elles soient françaises ou espagnoles. Il n’est pourtant qu’une question d’argent ».

Durant la contention dans la boîte à treuil, les sabots peuvent également être limés, voire incisés. Des coins de bois seront alors enfoncé entre les onglons. Cette opération déstabilisera fortement l’animal qui aura du mal à rester tranquille.

Sources (pour partie) et citations issues du site Terres taurines

L’alimentation

Avant l’arrivée des élevages spécialisés, le taureau, à l’état sauvage, était un animal puissant, imbattable et pesant plus de 600 kg. Difficile à combattre… Dès 1890, les premiers élevages font fortune en produisant une race de taureaux plus petits, moins rapides et ne pesant plus que 400 kg.

En France, on tente par de savants dosages de répondre à l’attente de toutes les catégories de public, des toreros vedettes et de l’afición. Se distinguent l’aficionado torista, amateurs de gros toros, et l’aficionado torerista, pour qui l’essentiel est le torero et qui « ne juge plus nécessaire de le – le taureau – surcharger artificiellement de kilos ».

A l’alimentation naturelle des pâturages est donc souvent substituée une alimentation abondante à base d’aliments composés : un ou deux kilos quotidiens d’un complément alimentaire riche en protéines auquel sont adjoint vitamines à haute dose, minéraux et même anabolisants (ce qui est totalement illégal). Cette alimentation artificielle au « pienso compuesto » donne des taureaux obèses, impressionnants, mais à mobilité restreinte, trop gras pour être réellement dangereux.

On passe donc de la caste adoucie répondant à la demande d’un marché dominé par quelques «toreros conformistes», au «zeste de piquant intermédiaire entre un taureau soumis et un auroch intolérable». Le torero Belmonte, en son temps, obtint que l’âge des taureaux qu’il combattait soit abaissé de cinq à quatre ans. Manolete, profitant de l’après-guerre, tuait des novillos de trois ans. A sa suite, les toreros des années cinquante et soixante, Dominguín, Ordoñez, El Cordobes… s’habituèrent à ce taureau âgé de trois ans et demi, voire quatre, «le plus souvent afeité, parfois même de façon honteuse» disent-ils.

L’apprentissage des combats

La « bravoure » du taureau doit être vérifiée afin d’éviter la dégénérescence, appauvrissement irréversible qui menace les lignées trop pures. L’apprentissage des combats commence donc très tôt. On fait subir aux bêtes une série de test cruels dans les arènes afin de sélectionner les futurs reproducteurs, géniteurs des « glorieux combattants ».

Si ils ont « une attitude défensive satisfaisante », ils seront sélectionnées. Dans le cas contraire, ils prendront le chemin de l’abattoir ou celui des autres activités taurines traditionnelles… Les plus faibles serviront de cobayes aux apprentis torero et matadors afin qu’ils se fassent la main.

« Le taureau doit arriver dans l’arène vierge de toute expérience de lutte contre l’homme. Dans le cas contraire, son intelligence du combat mise au service de sa puissance rendrait tout affrontement suicidaire pour le torero pourtant formé et entraîné ». Encore une fois, ce sont eux qui parlent…

En complément, une vidéo tournée dans une école de tauromachie montre à quel point le veau ou le taureau ne montrent aucune agressivité dès lors que les humains qu’ils vont croiser dans l’arène restent tout simplement immobiles.

L’élevage

Contrairement à l’idée faussement répandue qui veut que pour le taureau dit « de combat » le bonheur soit dans le pré, dès son plus jeune âge, il doit subir les traitements qui incombent à son rang :

  • Le sevrage et les bâtons dans le nez pour l’empêcher de téter…
  • Les marquages au fer rouge qui, s’ils sont perpétrés depuis la nuit des temps, n’ont rien d’une partie de plaisir pour l’animal !
  • Les marquages aux oreilles qui sont parfois découpées à vif au couteau.

Les taureaux peuvent également être soumis à un « exercice quotidien de marche forcée afin de les endurcir ».

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