Que des gendarmes fassent respecter la loi, rien de plus normal, c’est leur rôle. En revanche, quand certains d’entre eux la violent au détriment de nos droits fondamentaux de citoyens, il ne faut pas laisser passer ça sans rien dire. Nous laissons de côté, dans ce qui suit, les cas particuliers des douaniers et les soupçons avérés de terrorisme, ils sont hors sujet.

A titre d’exemple, une militante anticorrida expérimentée a été invitée par un simple coup de fil (ce qui n’est en rien une convocation officielle) à venir rencontrer des gendarmes qui désiraient lui poser quelques questions “de façon informelle”. N’ayant rien à se reprocher et se demandant ce qu’ils lui voulaient, elle a accepté.

Règle n° 1

Si des gendarmes vous invitent à venir les voir librement, vous avez le droit de refuser.

Corollaire n° 1 : Si des gendarmes vous invitent à venir les voir librement, c’est qu’ils n’ont aucun motif juridique pour vous forcer à venir et que leur but est de vous soutirer des infos que vous ne leur auriez jamais données volontairement. Votre intérêt est d’appliquer aussitôt la règle n° 1.

Les gendarmes étaient très conviviaux, ils lui ont proposé du thé, ils étaient souriants, sympas. Des gendarmes qui vous invitent dans leurs locaux pour boire le thé ?

Corollaire n° 2 : Pendant un entretien au poste, il n’y a pas de “gentil” gendarme. Si un gendarme est gentil avec vous, c’est qu’il veut vous piéger. Aucune exception.

Ils se sont mis à poser des questions très surprenantes : ils voulaient connaître des noms de militants anticorrida, leur téléphone, leur adresse. Stupéfaite, elle a refusé de leur donner ces informations. Ils l’ont gardée pendant deux heures et demie, multipliant les questions sur des sujets analogues et en particulier sur l’action menée à Rodilhan le 27 octobre 2013.

Règle n° 2

Si vous êtes au poste sans motif et qu’on ne vous notifie pas que vous êtes en garde à vue, vous avez le droit de partir quand vous voulez sans donner de raison.

Le seul motif qui permet à des gendarmes de vous retenir sans vous mettre en garde à vue est une vérification de votre identité. Dans ce cas précis, ils doivent au préalable vous informer de votre droit de faire prévenir le procureur de la République de la vérification dont vous faites l’objet et de prévenir une personne de votre choix. Dans ce cadre, les gendarmes ne peuvent vous garder que 4 heures au maximum.

Règle n° 3

Seul un officier de police judiciaire (OPJ) peut vous garder au poste pour une vérification d’identité. La durée maximale est de 4 heures. Ensuite, ce motif étant épuisé, c’est la règle n°2 qui s’applique.

En ce qui concerne cette militante, ils connaissaient parfaitement son identité depuis longtemps puisqu’elle organise depuis des années des actions anticorrida déclarées en toute légalité. Ils voulaient donc juste la faire parler sans avoir de motif ni surtout de contraintes juridiques à respecter. Rappelons qu’il est légal d’être anticorrida et que manifester est un droit garanti par la constitution.

Règle n° 4

Quel que soit le motif pour lequel vous êtes au poste, vous avez toujours le droit de faire prévenir un proche que vous y êtes.

Alors que la “conversation” se terminait, un policier a demandé à la militante de la prendre en photo et de relever ses empreintes digitales. Ceci est totalement abusif dans un cadre informel. La militante, surprise, a d’abord refusé. Le policier lui a dit qu’elle pouvait en effet refuser mais qu’elle devrait alors payer une amende de 1500 euros. C’est un mensonge. En cas de refus de prise d’empreintes et de photo, il n’y a d’amende à payer que si la personne retenue ne veut pas donner son identité ou fournit une identité de toute évidence inexacte (dans ce cas, l’amende est de 3750 euros). En dehors de cela, il n’y a aucune justification à prendre vos empreintes alors que vous êtes là en tant que simple témoin.

La militante ignorait que ces flics mentaient et elle a donc accepté. Ensuite, elle est partie.

Règle n° 5

Il est strictement interdit de vous prendre en photo et de relever vos empreintes sans raison motivée sauf s’il y a un doute réel sur votre identité (article 78.3 du code de procédure pénal).

On peut s’attendre à ce que d’autres militants anticorrida soient “conviés” de la même manière sans aucun motif. Tout laisse à penser que les forces de l’ordre veulent se constituer un fichier des anticorridas les plus actifs, avec photos et empreintes relevées abusivement. De cette façon, la prochaine fois qu’un fumigène (par exemple) sera oublié par terre lors d’une manifestation, les empreintes qu’il porte seront relevées et comparées à celles du fichier pour identifier et poursuivre en justice la personne qui l’aura tenu (si la manif est non autorisée, par exemple). Quand bien même, cela ne prouverait pas que vous l’avez utilisé, juste que vous l’avez touché (par curiosité, par exemple).

En complément et à titre informatif, voici quelques règles sur la garde à vue.

Il est évident que c’est l’étape suivante pour tenter de déstabiliser les militants si le ministère de l’intérieur, influencé par la paranoïa de certains élus aficionados, confirme son durcissement à notre égard.

Règle n° 6

Seul un OPJ a le droit de vous mettre en garde à vue. Il ne peut le faire que si vous êtes soupçonné(e) d’une infraction punie d’emprisonnement. Aucune exception.

Si vous avez été mis(e) en garde à vue juste parce que vous participez à une manifestation, même non déclarée, même si on vous accuse de bousculade ou d’injures, vous risquez au pire une amende, pas une incarcération.

Règle n° 7

Le motif de votre garde à vue doit vous être notifié dès le début de la garde à vue.

Règle n° 8

Vos droits doivent vous être notifiés : vous avez le droit de garder le silence, de faire prévenir un proche et d’avoir un avocat dès la première heure de garde à vue (commis d’office si vous n’en connaissez pas).

N’importe quel avocat vous le dira : à part donner votre identité, le mieux pour vous est de ne répondre à AUCUNE question, même d’apparence anodine (“gentil flic”), même très agressive (“méchant flic”), même et surtout si vous n’avez rien à vous reprocher. Pour toutes les autres questions, répondez juste que vous voulez un avocat ou taisez-vous. La loi vous y autorise.

Règle n° 9

Vous pouvez demander à voir un médecin à tout moment. Même si vous voulez le revoir toutes les trente minutes parce que vous avez la migraine ou mal au dos. Même si vous n’avez rien.

Règle n° 10

Vous avez droit à des repas chauds, aux heures normales, conformes à vos choix religieux.

Si vous voulez manger végétalien ou végétarien, dites que vous êtes bouddhiste.

Règle n° 11

Vous avez droit à des périodes de repos.

Règle n°12

Il est interdit de vous insulter, de vous frapper ou de vous humilier. Si cela vous arrive, ne répondez rien mais dès que vous serez dehors, portez plainte par lettre auprès du procureur de la République (pas du commissariat dont vous sortez, ne soyez pas naïf).

A la fin de la garde à vue (d’une durée maximale de 24 h dans les cas normaux), on doit vous remettre un procès-verbal de tout ce qui s’est passé et dit. Vous en avez marre, vous voulez partir mais lisez-le attentivement. Si quoi que ce soit ne correspond pas à la réalité, précisez par écrit que vous émettez des réserves avant de le signer. Si une seule des règles ci-dessus n’a pas été respectée, portez plainte.

Pour plus de détails sur la question de la garde à vue, vous avez un très bon article “Garde à vue en droit français” dans Wikipedia.

Ce qui est arrivé à cette militante et qui arrivera à d’autres montre que certains relais du pouvoir paniquent de plus en plus face à la généralisation des actions anticorrida et au recul de leurs spectacles barbares. C’est une excellente nouvelle pour notre cause. Raison de plus pour ne rien lâcher et pour ne pas se laisser piéger ni intimider par des pratiques illégales.

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