En 2023, nous avons eu la surprise d’apprendre que la municipalité de Pérols avait programmé une novillada1 dans les arènes municipales. Le CRAC Europe a alors immédiatement déposé un référé afin d’obtenir son annulation au motif d’une interruption de la tradition2 de la tauromachie espagnole à Pérols. Le référé qui s’est ensuivi nous a donné raison. Il reste maintenant à faire confirmer cette décision par un jugement sur le fond. Les débats se sont tenus le mardi 14 mai 2024 au tribunal administratif de Montpellier.

L’analyse du rapporteur va dans notre sens

Depuis plusieurs jours, notre avocate, Maître Hélène Thouy, nous avait communiqué les conclusions du rapporteur1. Toutefois, afin de ne pas nuire au dossier, nous avons pris la décision de ne pas communiquer la teneur du rapport. En effet, il revient au rapporteur de livrer lui-même le produit de sa réflexion juridique devant le tribunal, le jour de l’audience.

Madame le rapporteur qui a été chargée d’instruire le dossier et d’évaluer l’objet au regard du droit a donc pris la parole pour annoncer sa position. Elle a été sans détours : son analyse juridique confirme notre propre analyse en ceci que la tradition relative à la tauromachie espagnole a été interrompue à Pérols depuis 20 ans, aucun spectacle de tauromachie espagnole n’ayant eu lieu depuis dans cette commune. Elle confirme donc que la ville de Pérols n’est aucunement fondée à organiser des corridas ou des manifestations assimilées.

La ville de Pérols peine à produire des pièces convaincantes

Ce n’est pas l’avis de l’avocate de la ville de Pérols. Celle-ci avance que des spectacles taurins ont toujours eu cours dans la commune, dans un joyeux mélange entre tradition camarguaise et tradition espagnole. Or, l’alinéa 11 de l’article 521-1 du Code pénale qui exempt de poursuites pénales les organisateurs et acteurs de tauromachie espagnole dans des régions de tradition locale ininterrompue, ne concerne bien évidemment que la corrida. La bouvine – tradition camarguaise où les animaux ne sont pas mis à mort ni tourmentés au moyen d’armes blanches – n’est de facto pas concernée. C’est ce qu’a rappelé Cyril Vaucelle, adjoint au président, devant les médias en soulignant la dénomination du CRAC Europe qui ne fait référence qu’à la corrida. Il n’empêche que la ville de Pérols a dû fournir à la Justice des preuves d’une tradition de tauromachie espagnole ininterrompue sur son sol. C’est la règle en droit français et c’est heureux : on se doit de prouver ce que l’on avance. C’est ainsi que parmi les pièces produites par la municipalité, une photo de paëlla dégustée à Pérols a été exhibée pour asseoir la corrida dans la place. Le délibéré qui sera rendu sous quinzaine nous apprendra si les magistrats ont été convaincus, ou bien s’ils suivent les travaux juridiques de Madame le rapporteur.

Jean-Pierre Rico, maire de Pérols, prend la parole dans les médias

Les élus de la majorité municipale à l’initiative du retour de la corrida à Pérols, absents à l’audience, se sont fait entendre par la voix du maire au lendemain des débats. Hélas, toujours aucune preuve sérieuse et tangible de l’ininterruption de la tradition taurine espagnole sur le territoire pérolien. Pire, Maître Hélène Thouy a démontré à l’audience que cette tradition n’existe plus sur l’ensemble de l’agglomération de Montpellier dont Pérols fait partie.

Devant les micros tendus par les médias, Jean-Pierre Rico s’est donc réfugié dans l’attaque ad hominem en qualifiant les anticorridas « d’escrologistes » ou encore « d’animalistes sectaires ». Sachant que 78 % des Français rejettent la corrida, ça fait du monde. Enfin, il sombrerait presque dans le complotisme lorsqu’il avance que derrière le refus de voir de nouveau le sang couler à Pérols, se dissimuleraient des ambitions politiques. Nous n’avons pas connaissance de celles-ci et nous nous interrogeons sur le sens de son propos. En effet, parmi nous, personne n’envisage de briguer un mandat électoral à Pérols. Nous rappelons donc que nous sommes uniquement motivés par le rejet de la corrida, où qu’elle se tienne.

Amalgame bouvine – corrida (et paëlla), dénigrement et élucubrations fantaisistes sont au programme de la défense de la ville de Pérols alors que notre analyse de la situation a été confirmé par Madame le rapporteur. Nous attendons maintenant le délibéré.

1 Novillada : corrida avec de jeunes taureaux.
2 Le code pénal prévoit une exemption de poursuites judiciaires dans certaines régions dès lors qu’il n’y a eu aucune interruption de la pratique de la corrida depuis son implantation.
3 Au tribunal administratif, le rapporteur a pour mission d’évaluer la recevabilité de la requête ainsi que 
d’instruire le dossier en rappelant les textes en vigueur

 

Partage

Shares