Nous relatons aujourd’hui un témoignage important apporté par un militant du CRAC Europe sur les violences policières commises à Rodilhan le 27 octobre 2013. Au préalable, un rappel à l’usage des futurs convoqués qui souhaitent faire une déposition :

Contactez-nous pour nous en informer. Vous pouvez joindre Jean-Pierre Garrigues au 06 75 90 11 93 ou Roger Lahana au 06 11 54 02 83.

Le CRAC Europe assure votre soutien juridique pour toute action passée ou à venir dont il est l’organisateur.

  • Dénoncez les violences policières dont vous avez été témoins. Il ne faut pas laisser le champ libre à la campagne de désinformation menée depuis des mois par des aficionados désespérés sur la prétendue violence du CRAC. Les violents sont ceux qui tuent des taureaux ou des veaux pour s’amuser. Les violents sont ceux qui frappent, gazent ou blessent les manifestants qui protestent contre cette tuerie.
  • Vérifiez que tout ce que vous déclarez est bien porté sur la déposition que vous signerez.
  • Si pendant l’entretien vous estimez qu’on essaie de vous piéger, partez aussitôt, vous en avez le droit.
  • Si pendant l’entretien une question vous dérange, n’y répondez pas, vous en avez le droit.

Nous ne sommes pas les agresseurs, nous sommes les victimes.

C’est à la demande du Parquet de Nîmes que les gendarmes enquêtent sur ce qui s’est passé à Rodilhan le 27 octobre 2013. Il semble que nos messages sur le respect des règles qui s’imposent à eux aient été reçus 5 sur 5 par les autorités, comme le montre le témoignage qui suit. Ce retour à la neutralité des gendarmes chargés du dossier est le bienvenu, surtout dans le cadre d’une enquête qui met gravement en cause leurs collègues présents à Rodilhan.

Beaucoup d’entre vous ont choisi de ne pas répondre aux demandes d’entretien “informel”, ce qui est en effet leur droit. Cela étant, si vous avez été témoin direct de violences policières, n’hésitez pas à en profiter pour les dénoncer. C’est ce que vient de faire Jérémie, militant du CRAC Europe, convoqué hier et qui a décidé d’accepter l’entrevue pour pouvoir dire ce qu’il avait vu. Ce qui suit est rendu public avec son accord.

A son arrivée, un gendarme lui a aussitôt précisé qu’il avait le droit de ne pas répondre et celui de partir quand il le voulait. Ça va mieux en le disant. L’ambiance était détendue, le café offert et Jérémie pas dupe, même s’il se sentait parfaitement à l’aise. D’emblée, il a précisé qu’il était adhérent du CRAC Europe et qu’il comptait bien continuer à participer à ses futures actions.

Un gendarme lui a dit que, du fait de sa participation à la manifestation en tant que militant du CRAC, il était mis en cause dans le dossier et non simple témoin. Jérémie a voulu savoir quelles en sont les conséquences. Le gendarme a répondu que sa déposition serait conservée pendant une durée de vingt ans (pas mal pour quelqu’un qui n’a rien fait d’illégal…) mais qu’aucune mention ne serait portée à son casier judiciaire (encore heureux, vu qu’il n’est accusé de rien).

Jérémie a ensuite été invité à faire état de tout ce qu’il avait vu. Il a donc décrit en détails les multiples scènes auxquelles il a assisté : manifestants pacifiques tabassés à coups de tonfa (la matraque que portent les CRS), gazés à bout portant même quand ils étaient assis par terre immobiles, blessés par les flashballs et les grenades déflagrantes lancées par les forces de l’ordre. Il a cité le cas d’une manifestante âgée totalement inoffensive qu’il a secourue parce qu’elle suffoquait à cause des lacrymos. Il a insisté sur le fait qu’il a trouvé le comportement violent et disproportionné des gendarmes extrêmement choquant.

Le gendarme enquêteur a voulu savoir – ce qui est légitime – si Jérémie avait aussi vu des violences côté manifestants. Il a répondu que le plus violent qu’il a eu l’occasion de voir a été un manifestant masqué qui secouait une grille (j’espère que la grille a porté plainte). Et l’orchestre retenu sur le parking ? Non, Jérémie était juste à côté et il n’a vu aucune violence, les musiciens ont simplement été retenus dans leur véhicule. Et l’aficionado qui a été couvert de peinture ? Jérémie n’a pas assisté à l’incident et ne sait donc pas qui a lancé la peinture, rien n’indiquant qu’il s’agit d’un membre du CRAC Europe.

Il a enfin souligné que lors du rassemblement des manifestants sur le parking dès le matin, puis à plusieurs reprises ensuite, Jean-Pierre Garrigues a très clairement demandé à toutes les personnes présentes de se comporter de façon non-violente, de ne pas utiliser d’insultes et de faire savoir systématiquement aux responsables des différents groupes si certains manifestants recourraient à la violence parce que dans ce cas, les fauteurs de trouble seraient aussitôt remis aux forces de l’ordre par nos soins.

Enfin, il a à son tour posé une question aux gendarmes : étaient-ils en mesure de lui montrer une seule photo d’un manifestant en train de commettre une violence ? L’un des gendarmes a répondu que oui, a fouillé dans un dossier et a sorti une photo où on voit une militante tenir un fumigène allumé. Jérémie a ri et demandé en quoi c’était violent. Le gendarme a dit qu’elle était sur le point de lancer ce fumigène vers les barrages. Vraiment ? Et l’a-t-elle fait ?

Aucune réponse du gendarme qui a replongé dans son dossier, en disant qu’il avait aussi une photo d’une autre manifestante en train de lancer un pavé. Sauf que sur la photo, on voit une dame avec un homme devant elle et, d’après le gendarme, il cache justement le pavé qu’elle tient dans la main. Pavé invisible, donc, et qui n’a jamais été lancé de surcroît, ça va chercher dans les combien au regard de la loi ? Le gendarme a alors ajouté qu’un des policiers a été poignardé par un manifestant. Jérémie lui a demandé pourquoi ses collègues, pourtant nombreux, ne l’avaient pas arrêté. Pas de réponse.

Pour finir, il a été demandé à Jérémie de laisser ses empreintes mais cette fois, le gendarme lui a dit qu’il avait le droit de refuser et il a insisté à plusieurs reprises pour dire qu’il était totalement neutre dans cette affaire. Tiens, tiens… S’est-il senti obligé de le préciser à cause de notre dénonciation publique de la collusion entre gendarmerie mobile et école taurine de Nîmes ?

Au moment de se séparer, dans une ambiance toujours cordiale et après que Jérémie eut vérifié que tout ce qu’il avait dit était bien noté sur sa déposition, l’un des gendarmes lui a clairement dit qu’il s’agissait d’une enquête qui n’aboutirait sûrement sur rien.

De fait, seules les forces de l’ordre ont été violentes et seuls les manifestants ont été des victimes. Si le Parquet a lancé cette enquête parce qu’il a un peu trop vite cru sur parole les élucubrations sur le CRAC “ultra-violent” voire “terroriste” propagées par Reder, Fournier, Viard et consorts, il y en a qui vont se retrouver sérieusement décrédibilisés quand les conclusions seront rendues publiques.

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