Interpellé par écrit par le CRAC Europe sur sa position concernant l’abolition de la corrida, Henri Emmanuelli a répondu dans une lettre reçue aujourd’hui et partiellement rendue publique dans la presse. Fervent aficionado, Emmanuelli est le député des Landes, l’un des pires départements tauromachiques de France, qui a vu cet été deux actions fortes organisées par le CRAC Europe, celle de Rion-des-Landes dont tous les médias ont parlé et celle de Dax qui a vu des violences policières extrêmes et a entraîné la mise à l’écart par le maire de trois conseillers municipaux EELV qui avaient eu l’audace d’y participer.

Dans sa réponse, Emmanuelli décrit avec exactitude ce qu’est une corrida : le spectacle d’ “un animal blessé et mourant dans une arène“. Et il décrit avec non moins d’exactitude l’attitude de déni des aficionados qui, eux, ne voient pas ça.

“Je comprends la sensibilité des personnes qui ne veulent pas imaginer et encore moins voir un animal blessé et mourant dans une arène. Mais en retour, acceptez la sensibilité d’aficionados, qui ne voient pas la même chose qu’eux.“

Tout est dit, dans ces deux phrases : les aficionados, face à “un animal blessé et mourant dans une arène“, ne voient pas la réalité, que même un aficionado aussi averti qu’Emmanuelli reconnait. Or, bien sûr qu’ils voient l’animal blessé et mourant. Ils le voient parfaitement bien, ils ont même payé cher pour le voir le mieux possible. Le seul problème qu’ils ont, c’est qu’ils s’en réjouissent. En raison de leur “sensibilité“, comme le souligne avec justesse Emmanuelli.

Quant au mot “sévices” dont Emmanuelli regrette qu’il soit utilisé pour parler de la corrida, c’est celui choisi par le code pénal pour la décrire, de même que la qualification “d’actes de cuauté” (article 521.1). Le député déplore qu’on parle également de “tortures” et de “barbarie”. Ces termes découlent pourtant directement du même article de loi. Une torture, selon le dictionnaire de l’Académie française, est “une souffrance intense infligée à autrui” et l’une des définitions de “barbarie” est “cruauté”. Il est donc parfaitement légitime – en plus d’être légal – d’user de ces mots pour décrire la corrida.

De même, l’utilisation conjuguée du code pénal et du dictionnaire nous autorise à dire sans que cela ne constitue une insulte qu’un aficionado est un pervers (personne qui aime le spectacle de la souffrance) et un sadique (personne qui se réjouit de la souffrance infligée à d’autres). Telle est la nature profonde de leur “sensibilité” si brillamment mise en avant par Emmanuelli. Si cela est insupportable aux amateurs de corrida, qu’ils aillent se faire soigner et désintoxiquer d’une passion aussi morbide.

Emmanuelli ajoute doctement : “A mettre sur le même plan la mort d’un animal et la mort d’un être humain, on en vient facilement à trouver aussi naturel de tuer un homme qu’un animal“.

En effet ! Aussi faut-il ne tuer ni l’un ni l’autre ! Il est largement démontré que les personnes qui prennent plaisir face à la souffrance animale ont une forte propension à commettre également des violences sur leurs congénères humains. L’exemple le plus extrême est donné par les serial killers : tous ou presque ont commencé leur dérive criminelle avec des tortures sur des animaux.

Raison de plus pour abolir la corrida et réprimer sévèrement toutes les formes de torture sur les animaux. Emmanuelli y voit “la montée en puissance d’une nouvelle forme d’ordre moral“. Nous y voyons une question élémentaire d’éthique.

Retrouvez cet article sur le blog d’Anna Galore

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